Votre mère ou votre père entre en Ehpad, la maison se vide, et vous envisagez d’y vivre pour éviter qu’elle se dégrade. L’idée paraît de bon sens, mais elle réveille immédiatement des questions juridiques et familiales sensibles. Entre droit de propriété, charges courantes et future succession, chaque choix laisse une trace. Vous avez des droits pour occuper le logement, mais aussi des risques à anticiper si vous ne formalisez rien. Avant de poser vos meubles, il faut cadrer l’occupation et préserver l’équilibre entre frères et sœurs.
Qui peut habiter légalement la maison du parent en Ehpad ?
Le parent reste propriétaire tant qu’il est vivant et peut autoriser qui il veut à occuper le logement. Son accord peut être oral, mais un écrit évite les malentendus et prouve la réalité de l’autorisation. En présence de plusieurs enfants, l’occupation par l’un seul peut être vécue comme un avantage caché, surtout si elle empêche une location ou une vente. Le point d’équilibre consiste à reconnaître l’accord du parent, à définir les charges assumées et à tracer clairement les flux financiers. Ce cadre protecteur éteint ensuite bien des soupçons au moment du partage.
Si vous occupez les lieux, la question des charges arrive très vite, à commencer par la fiscalité du bien. Pour éclairer les échanges avec la fratrie, appuyez-vous sur les règles de la taxe foncière afin de distinguer ce qui relève du propriétaire et ce que l’occupant peut raisonnablement prendre à sa charge. Formaliser cet équilibre dans une courte convention familiale limite les conflits, surtout en cas d’occupation prolongée.
Faut-il payer un loyer ou signer un bail familial ?
Habiter gratuitement la maison du parent peut être assimilé, à terme, à un avantage indirect, surtout si le bien aurait pu être loué. Un bail à loyer modéré clarifie la situation : le parent déclare un revenu, l’occupant bénéficie d’un cadre légal et chacun sait qui paie quoi.
Le loyer peut rester symbolique, l’essentiel étant la traçabilité et la cohérence avec le marché local. Ce choix n’empêche pas d’ajuster ponctuellement les montants pour tenir compte de travaux ou d’une baisse de ressources. La transparence prime toujours sur l’improvisation.
Le bail familial évite aussi que l’occupation soit requalifiée en donation déguisée lors de la succession. En cas de contestation, le notaire appréciera la réalité du loyer, la durée d’occupation et l’impact économique pour les cohéritiers. Pour mesurer l’effet global, rappelez les règles d’abattements en matière de succession, car elles influencent la perception d’un éventuel avantage. Plus la documentation est précise, moins l’occupation ressemble à un cadeau masqué.
Autre option, moins engageante qu’un bail classique : une convention d’occupation précaire, utile si l’horizon reste incertain. Elle constate l’accord du parent, fixe une participation aux charges et rappelle que l’occupation peut cesser dès qu’une vente ou une location devient nécessaire pour financer l’Ehpad. Ce document court et signé sécurise déjà beaucoup, sans vous enfermer dans un schéma rigide.
Risques successoraux et tensions dans la fratrie : comment les prévenir ?
Occupation gratuite et donation indirecte
Vivre sans contrepartie dans la maison peut être réintégré à la succession comme un avantage à « rapporter ». Le risque augmente si l’occupation a duré longtemps ou empêché une mise en location. Pour se prémunir, consignez dates, travaux effectués et participation aux dépenses, et préférez un loyer même modeste à une gratuité totale. Ce dossier factuel fera la différence si un désaccord surgit. Plus la situation est écrite, moins l’accusation de libéralité cachée tient.
Indivision future, impôts et démarches
Au décès, la maison entre en indivision jusqu’au partage, et l’occupant perd son « privilège » s’il n’existe pas de droit spécifique. La fratrie doit alors décider : vente, attribution à l’un, ou maintien en indivision avec indemnité d’occupation. Pour fluidifier la suite, anticipez les démarches administratives, notamment qui se charge de prévenir les impôts en cas de décès et de récupérer les documents utiles comme l’avis d’imposition de la personne décédée. Cette préparation administrative évite les blocages de dernière minute et crédibilise votre gestion.
Aide sociale et récupération sur patrimoine
Si le parent bénéficie d’aides pour financer l’Ehpad, le département peut activer la récupération sur succession. Une occupation gratuite qui a empêché une vente ou une location peut être pointée du doigt. Là encore, un loyer traçable, des devis de travaux conservés et une convention écrite forment une ligne de défense solide. L’objectif est simple : montrer que l’occupation n’a pas appauvri artificiellement le parent. Ce réflexe documentaire protège à la fois l’occupant et la succession.
Que faire dès maintenant pour sécuriser la situation ?
Commencez par un entretien clair avec le parent et la fratrie afin d’acter l’accord, le type d’occupation et la répartition des charges. Rédigez une convention courte, signez-la et joignez-y un état des lieux pour cadrer la responsabilité en cas de dégradation. Fixez une contribution mensuelle cohérente avec le marché et l’état du bien, sans oublier l’assurance habitation. Si des travaux sont nécessaires, distinguez l’entretien courant et les grosses réparations pour éviter les discussions sans fin. Enfin, programmez un point annuel avec le notaire pour adapter le cadre si la situation évolue.
- Écrit d’accord ou bail familial, daté et signé, avec participation aux charges clairement listée.
- Relevés et paiements centralisés (virement dédié), archivés avec quittances et attestations.
- Inventaire des travaux : qui paie quoi, avec devis et factures jointes au dossier familial.
- Clause de sortie anticipée si vente ou location devient nécessaire pour financer l’Ehpad.
- Consultation annuelle du notaire pour aligner occupation, fiscalité et projet de succession.
Et si le parent souhaite vous protéger formellement ?
Plutôt que de s’en remettre à une tolérance, le parent peut vous consentir un droit d’habitation ou un usufruit temporaire, mieux encadrés juridiquement. Ces outils réservent la jouissance du logement tout en sécurisant la fratrie sur la propriété. Ils demandent un acte notarié et une vraie réflexion sur la durée et le financement de l’Ehpad.
En contrepartie, ils évitent les procès d’intention et les renversements brutaux en indivision. Si la dépendance s’installe dans le temps, cette voie offre une paix familiale durable.
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Benjamin Lambert est spécialisé dans l’analyse des marchés financiers et la gestion d’actifs. Avec plus de 12 ans d’expérience, il apporte des analyses claires sur les tendances boursières, les investissements durables et les stratégies fiscales. Sur FAIRE, Pierre décrypte l’actualité économique pour mieux vous guider dans vos choix financiers.